Tomber amoureux… Qui n’a jamais ressenti ces fameux papillons dans le ventre, cette euphorie, ces nuits blanches à penser à l’être aimé ? Mais entre l’amour et le désir, la frontière est parfois mince. Ces deux sentiments – si intenses soient-ils – ne se résument pas aux mêmes envies. Alors, comment les différencier ?
Dans notre société moderne, entre applications de rencontre et culture du zapping, il est de plus en plus difficile de faire la part des choses. On veut tout, tout de suite, sans effort. Résultat : on confond attraction et amour, on enchaîne les conquêtes sans lendemain, avant de se lasser et de recommencer. Peut-on encore vraiment aimer dans ces conditions ? Ou avons-nous simplement perdu le sens du mot « amour » ?
La chimie du désir et de l’amour
Pour mieux comprendre les rouages du désir et de l’amour, il faut s’intéresser à ce qu’il se passe dans notre cerveau. Dans les années 90, des chercheurs comme l’anthropologue Helen Fisher ont mené des études poussées sur le sujet. Ils en ont conclu que l’amour romantique pouvait se décomposer en 3 états :
- Le désir
- L’attirance
- L’attachement (ou « amour amical »)
Chacune de ces facettes de l’amour correspond à des réactions chimiques bien précises dans notre cerveau.
Le désir et les hormones sexuelles
Le désir est dominé par l’appétit sexuel et la recherche de satisfaction physique. Lorsqu’on ressent du désir pour quelqu’un, des hormones comme la testostérone ou l’œstrogène sont libérées. Elles augmentent la libido et les pulsions sexuelles.
L’attirance et la dopamine
L’attirance va au-delà de l’appel des sens. Quand vous avez quelqu’un en tête, que vous rêvez de le/la revoir, d’en savoir plus sur lui/elle… C’est le signe d’une attirance. Dans ce cas, des neurotransmetteurs comme la dopamine ou la noradrénaline entrent en jeu. Ils provoquent une sensation d’euphorie, une perte d’appétit, des nuits blanches…
L’attachement et l’ocytocine
Enfin, l’attachement correspond à un amour plus mature, fait de tendresse et de complicité. Contrairement au désir et à l’attirance, ce sentiment est généralement plus stable et durable. L’attachement libère des hormones de lien social comme l’ocytocine ou la vasopressine.
Les signes qui différencient l’amour du désir
Maintenant que l’on comprend mieux ce qui se trame dans notre tête, quels sont les signes concrets qui permettent de différencier l’amour du désir ? Les experts en relations amoureuses nous éclairent :
Le désir est physique, l’amour émotionnel
« Quand vous ressentez du désir, vous avez une envie irrépressible de faire l’amour avec l’autre. Quand vous êtes amoureux, vous voulez aussi être proche émotionnellement, comprendre ses besoins, ses sentiments. Vous voulez passer du temps ensemble, rencontrer ses amis. » Dr Judith Orloff, psychiatre.
Le désir est immédiat, l’amour prend son temps
« L’amour se construit dans la durée, alors que le désir est satisfait par un plaisir immédiat. Le désir est un sprint, l’amour un marathon. » Janet Brito, psychologue.
Le désir reste en surface, l’amour va en profondeur
« Le désir se concentre sur le corps et la séduction. L’amour demande de se dévoiler émotionnellement, de partager ses peurs, ses rêves… Vous baissez votre garde. » Ryan Howes, psychologue.
Le désir est bref et soudain, l’amour lent et stable
« Le désir ne dure qu’une nuit. L’amour est un repère stable sur la durée, qui peut durer toute une vie s’il est bien entretenu. » Iris Krasnow, auteure.
Le désir s’évanouit, l’amour perdure
« Le désir naît d’un appétit intense qui finit par disparaître. L’amour se construit sur un attachement qui se renforce avec le temps. » Shannon Chavez, psychologue.
Le désir est égoïste, l’amour altruiste
« Quand vous désirez quelqu’un, vous voulez assouvir ce désir à tout prix. Quand vous aimez, le bien-être de l’autre passe avant vos propres envies. » Ryan Howes.
Une société qui confond amour et désir
Notre époque n’est clairement pas la plus propice pour distinguer désir et amour. Entre culte de l’instantanéité et peur de l’ennui, nous avons tendance à tout confondre :
On recherche l’excitation, pas l’engagement
On ne veut pas d’un·e partenaire de vie, juste quelqu’un pour pimenter le moment présent. Dès que l’excitation retombe, on fuit. On ne croit pas en la force des habitudes et de la vie quotidienne.
On papillonne d’une conquête à l’autre
On enchaîne les aventures sans lendemain, toujours à la recherche de la prochaine dose d’adrénaline. On collectionne les numéros de téléphone mais on ne prend pas le temps de vraiment connaître les personnes.
Nous sommes des éternels insatisfaits
On est déçu par tout le monde tellement on en attend trop. On veut la perfection, tout de suite. Alors on zappe et on recommence, sans donner leur chance à nos prétendant·e·s.
Le sexe prime sur la connexion émotionnelle
Entre sites de rencontres et culture du casual dating, on privilégie le sexe sur la véritable intimité. Une relation sans sexe semble impensable.
Peut-on encore vraiment aimer ?
Face à ce constat, une question se pose… Peut-on encore vraiment aimer aujourd’hui ? Avons-nous définitivement perdu le sens du mot « amour » ?
Il faut rester optimiste. Et comprendre que l’amour demande des efforts. Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas un sentiment irrationnel qui nous tombe dessus par magie. C’est un choix quotidien :
- Celui d’accepter l’autre avec ses qualités et ses défauts
- Celui de communiquer en cas de problème au lieu de fuir
- Celui de sortir de notre zone de confort pour entretenir la flamme
Alors oui, il est toujours possible d’aimer de nos jours. À condition de réapprendre la valeur de l’engagement et des petits bonheurs du quotidien. Et surtout, de prendre le temps de construire une relation avant de se précipiter dans le grand bain de la passion.
Car contrairement à une idée bien ancrée, le véritable amour ne canarde pas sans prévenir tel un coup de foudre. Non, le vrai amour se cultive patiemment, jour après jour. Alors, êtes-vous prêt·e à relever le défi ?